Mes peintures sont des histoires que je me raconte... Elles ont pour point de départ le familier, ces objets qui nous entourent presque sans être vus, ces répétitions de gestes dont est fait notre quotidien, s'accroupir, donner, verser, compter, raconter. Mais aussi ces êtres qui peuplent nos vies jour après jour, l'enfant, la fille-mère, ces moi-imaginés et ces personnages à la frontière de deux états, la douloureuse innocence des mères, leur apre générosité mais aussi leur joie enfantine et le plaisir des larmes quand elles atteignent enfin le sol. Il s'agira toujours de la femme, cette femme multiple que je continue à chercher dans les plis de chaque robe. Elles sont animistes ces femme, animales, anodines et miraculeuses. Elles me tiennent toutes par la main et c'est avec elles que j'avance dans ma démarche créatrice.
Sensible à la dimension poétique des choses, les objets deviennent des histoires quand je les peins, une théière, un bol sont autant d'invitations à contenir, à offrir, autant de goûts amers et gais à regarder sur la surface de ma toile. Ainsi j'invite à goûter à mon travail, à le lire.
Des femmes, des bols, de la pluie qui tombe sur des parapluies corolles: les dix-huit toiles de l'artiste disent toutes son interrogation sur le rôle de la femme, justement. Femme originelle, femme-enfant, portrait de la mère, elles sont le fruit d'un questionnement du peintre. Et lorsqu'on apprend qu'elle a 28 ans et deux filles, cette maturité stupéfie.
D'ailleurs les dessins de ses enfants l'inspirent. Les visages sont stylisés, un peu à la manière de l'expression enfantine mais l'émotion qui s'en dégage est forte. Les couleurs sont brutes, vivantes. Sarah Vasey mêle la craie, l'acrylique, et le marouflage. Le bol est un thème récurrent. Il est une structure de base en céramique. Réceptacle de la graine, il est porteur de vie. « J'ai été un bol en portant mes enfants » souligne-t-elle.
Sarah Vasey est à l'évidence une artiste à suivre de très près.
Eliane Hindi, journaliste
Sa peinture est à son image, fraîche et acidulée. Le trait noir, ferme et maîtrisé souligne l’anecdote. Il cadre l’histoire, le sujet, l’événement ou l’instant qu’elle évoque dans les titres raffinés de chacune de ses œuvres. Tout en laissant planer le mystère, elle semble les avoir vécus, ressentis, analysés dans tous leurs recoins pour nous les restituer. Elle dévoile avec retenue, nous incitant à demander plus. Et l’on se demande si, sous cette pudeur ne couve pas une passion contenue. On entrevoit ce que pourrait être le feu d’artifice si jamais elle ouvre la bonde de sa réserve.
Michel Deville, galeriste